Histoire de Dinan
La région de Dinan est habitée depuis le Néolithique, comme en témoigne la présence d’un dolmen en ruine à la sortie de la ville en direction de Lanvallay.
Sa proximité avec la grande et antique cité gallo-romaine de Corseul (du Ier siècle av JC au IVème siècle ) et le port gallo-romain de Taden (Entre le Ier et le IVème siècle) permet d’en déduire une occupation humaine à cette période.
L’histoire de Dinan est mieux connue à partir du XIème siècle, bien que le site eût été occupé depuis l’Antiquité.
IXème siècle
Un premier édifice d’importance, l’abbaye Saint-Magloire de Léhon, est construit aux environs de 850 sur les bords de la Rance. A un kilomètre à peine de la future ville de Dinan, Nominoé, souverain de Bretagne de 845 à 851 à l’origine de la naissance d’une Bretagne unifiée et indépendante, y fonde le prieuré de Saint-Sauveur de Redon et y entrepose les reliques de Saint-Magloire.
Le mouvement produit par les nombreux pèlerins qui viennent vénérer les reliques de Saint-Magloire, la renommée et la richesse du monastère de Léhon, créent en ce lieu un centre important.
La Rance devient dès lors une voie commerciale et un port s’établit à proximité de Léhon, au point où s’arrête le flot de la marée montante (emplacement actuel du port).
Autour de ce port, se forme un petit village, sous ce long plateau de roches encore désert. C’est alors le début de l’habitation humaine et de la civilisation dans cette partie de la vallée de la Rance, et en ce sens on peut dire que Léhon a fondé Dinan, c’est-à-dire que par sa préexistence, Léhon a amené la fondation de cette ville au lieu où elle s’est formée. A cette époque, le passage de la rance se fait certainement à gué.
L’importance du monastère de Léhon ne permettait pas de laisser ce lieu sans défense. Il était également important de surveiller le cours de la Rance afin de le protéger contre les Vikings Normands qui avaient commencé, avant 850, à envahir de temps à autre les côtes de l’Armorique.
Ce qui implique, dès cette époque, l’existence d’une forteresse à Léhon dominant la Rance et l’abbaye et qui est toujours présente.
Ce château de Léhon aurait donc dû devenir le chef-lieu de la nouvelle seigneurie. Mais c’était sans compter sur l’autorité de l’abbé de l’abbaye de Léhon, qui à lui seul était un obstacle.
En effet, à Léhon, à part le château, tout dépendait de l’abbé, le château était donc encerclé par le domaine abbatial et la terre ecclésiastique. Le seigneur n’aurait pas pu bâtir, comme d’habitude, une petite ville autour de son château sans courir le risque de rentrer en conflit avec l’abbé.
En outre, le site de Léhon est une gorge, un entonnoir dominé de tous côtés, qui ne se prête pas au développement d’une ville avec une situation forte. Le site de Dinan est l’opposé : il y a là une longue plate forme défendue par une pente abrupte, une sorte de précipice; sur cette crête une agglomération d’habitants pouvait se former, se développer librement, dans une position facile à défendre.
XIème siècle
Aux environs de 1030 – 1040, le vicomte d’ Alet (Ancien nom de Saint-Malo), donne des terres et des droits seigneuriaux à son fils cadet, Josselin, qui à pour charge de les mettre en valeur. Il fonde alors la ville de DINAN sur un domaine sur lequel l’Abbé de Léhon n’avait aucun pouvoir, ces terres étant purement laïques. Josselin devient alors le premier seigneur de Dinan.
Ce nom de Dinan était sans doute déjà porté par le petit port au bord de la Rance, peut-être même par quelques cabanes hissées sur cette crête rocheuse, au bord de ce promontoire, véritable forteresse naturelle qui domine la vallée. Le nom en lui-même provient certainement de « Din » qui signifie forteresse en vieux Breton ou de « Dunon » colline fortifiée, forteresse en gaulois.
Au port, un premier pont est mentionné en 1070. À l’origine, le pont reposait sur cinq arches en plein cintre et arcs brisés. La première arche, coté Dinan, en plein cintre a été bouchée et terrassée du fait de la rétractation du lit de la Rance mais elle est toujours présente. Ce pont est toujours debout, et est connu aujourd’hui sous le vocable « Vieux pont de Dinan ».
Le premier ouvrage défensif de Dinan construit par Josselin était une tour en bois appelée «Châteauganne» sur une motte castrale fortifiée et entourée d’une palissade en bois (détruite vers 1170).
Son emplacement présumé est le lieu de l’actuelle sous-préfecture, sur un promontoire au nord-est de la ville, qui se trouve à l’extérieur de l’enceinte actuelle, et qui permettait le contrôle du pont et du port établis en contre bas sur la Rance.
Il n’en reste aujourd’hui que le nom, la résidence du sous-préfet, située sur ce promontoire, est en effet toujours appelée Château-Ganne.
Ce promontoire dominant la Rance était idéalement situé stratégiquement. Point de rupture entre la Rance maritime et la Rance fluviale, le port de Dinan se développa très vite et entre très tôt en relations commerciales avec l’Angleterre et les Flandres tandis que le « vieux-pont » est le seul passage terrestre jusqu’à l’estuaire, source de péage et donc de profits. De même, la rue du Jerzual est le seul accès à la partie haute du plateau rocheux.
La seule trace de cette motte castrale figure sur la scène 19 de la tapisserie de Bayeux sur laquelle on peut voir le siège de Dinan en 1064 et l’indication : « Hic milites Willelmi ducis pugnant contra Dinantes et: cvnan: claves: porrexit: » : « Ici les soldats du duc Guillaume combattent contre les Dinannais et Conan tendit les clefs (de la ville) ».
On peut y voir, du côté droit de la tour, Le duc de Bretagne, Conan II, qui capitule et remet les clefs de la ville sur une lance au duc de Normandie.
Autour du pont de Dinan, les faubourgs du Jerzual (côté Dinan) et de la Magdeleine (côté Lanvallay) fonctionnaient ensemble.
La Rance n’a jamais été une frontière.
A l’ origine, ces deux quartiers sont issus d’une même fondation monastique.
En effet, avec le développement du port et l’augmentation de la population, une première église Saint-Malo est construite en 1066, et un couvent bénédictins apparait, le prieuré de la Madeleine-du-Pont vers 1070, côté Lanvallay.
Ce sont les fils et petit-fils de Josselin, Olivier et Geoffroy Ier, qui feront appel aux moines bénédictins de Saint-Florent de Saumur pour qu’ils s’installent sur les bords de Rance.
Seuls quelques bâtiments de service de ce premier couvent subsistent entre la rue du Four et la rue de l’Abbaye à Lanvallay.
XIIème siècle
A l’étroit sur son promontoire, la ville s’étend quelques centaines de mètres en retrait du château, sur son emplacement actuelle, et cette cité naissante prospère rapidement du fait de sa situation et de son port.
Dinan se développe alors sur deux paroisses pré-existantes, la paroisse Saint-Malo et la Paroisse Saint-Sauveur. Pour préserver ces paroisses, elles deviennent des prieurés en 1108.
Après l’église Saint-Malo, une seconde église paroissiale est construite, l’église Saint-Sauveur, dès 1123, ce qui atteste d’une forte croissance démographique.
Dès 1124 et suite à la mort de Geffroy Ier, la ville de Dinan est partagée par tirage au sort entre Olivier II et Alain de Dinan, ses deux fils.
Olivier II reçoit la moitié Nord et le château, à Alain de Dinan revient toute la moitié Sud, avec le château de Léhon et la seigneurie de Bécherel.
D’après certaines sources, le Château de Dinan aurait rapidement été délaissé par les seigneurs de Dinan Nord qui bâtiront alors un palais qui aurait ensuite été intégré à la construction du couvent des Cordeliers en 1251.
En 1154, le géographe arabe Al Idrissi décrit Dinan comme une «ville ceinte de murs en pierres, commerçante, et port d’où on expédie de tous côtés des marchandises».
c’est sûrement exagéré, mais il existait certainement des premiers ouvrages de fortifications, probablement des côtés Nord et Nord-Ouest, plus exposés aux attaques.
Aucun document d’époque n’ayant été conservé, il n’est pas possible de dater les débuts de la construction des remparts avec précision. La partie basse de la porte Saint-Malo et quelques portions de courtine pourraient pourtant dater de cette époque.
XIIIème siècle
Aux XIIème et XIIIème siècles, les seigneurs de Dinan se trouveront à la tête d’une cité riche et dynamique.
Les premiers couvents intra-muros apparaissent: Le couvent des Dominicains (ou Jacobins, ou encore des frères prêcheurs) est créé entre 1215 et 1221, et le couvent des Cordeliers en 1251.
Sans surprise, un tel succès attire rapidement la convoitise, à commencer par celle du duc de Bretagne, Jean Ier, qui n’hésite pas à acquérir Dinan en 1264 au mépris des droits d’Henri III d’ Avaugour, l’héritier de la seigneurie. Dinan Nord et Dinan Sud sont alors réunies en une seule et unique ville : Dinan.
En 1283, après vingt années de procès, gagné par le duc, et d’intimidations, Dinan devient ville ducale.
XIVème siècle
Sous l’autorité des ducs, l’essor de la ville se poursuit.
Le gigantesque « Champ aux chevaux », les actuelles places du Champ et Duguesclin, est aménagé en 1319 et donne une idée de l’ampleur des marchés Dinannais, dont la tradition se poursuit encore de nos jours avec le grand marché du jeudi.
Mais c’est surtout avec la construction de l’enceinte urbaine, que les ducs de Bretagne vont imposer leur marque sur Dinan.
D’une circonférence de plus de 3 kilomètres, comprenant quatre portes et de nombreuses tours, les remparts de Dinan sont alors les plus importants de Bretagne, après ceux de Nantes et de Rennes.
La place-forte de Dinan est un dispositif majeur de la défense du nord-est de la Bretagne.
Le couvent des Trinitaires est fondée en 1336.
En 1341, le duc Jean III de Bretagne meurt sans descendance. Les prétendants au trône sont, d’une part Jeanne de Penthièvre, nièce du duc de Bretagne Jean III, mariée à Charles de Blois, parent du roi de France, et, d’autre part, Jean de Montfort, demi-frère du défunt duc, allié au roi d’Angleterre.
La Bretagne entre donc dans une guerre de succession fratricide pour le duché de Bretagne qui durera 23 ans, jusqu’en 1364.
En février 1357, au cours de cette guerre, Bertrand Du Guesclin et son frère Olivier, défendent la ville assiégée par les troupes anglaises qui sont sous les ordres du duc de Lancaster et les Bretons fidèles à Jean de Montfort.
Au cours d’une trêve, Thomas de Canterbury, chevalier et frère de l’archevêque de Canterbury, capture Olivier. Bertrand, en colère, l’affrontera en combat singulier sur la place du Champ et en sortira vainqueur. Dès le lendemain, suite à ce combat, le duc de Lancaster reçoit du roi d’Angleterre l’ordre de lever le siège de la ville. Les anglais quittent alors Dinan et se rendent à Rennes. ( Récit du combat sur ce site dédié à la guerre de 100 ans: https://la-guerre-de-cent-ans-et-nous.com/siege-de-dinan-1359-du-guesclin-contre-canterbury/ )
Bertrand Du Guesclin, est l’une des personnalités les plus controversées de l’histoire de Bretagne. Si la majorité des français en font un héros de la Guerre de Cent ans, d’autres voient en lui un traître dont le zèle à servir le roi de France anticipa la fin de l’indépendance du Duché de Bretagne.
Il est pourtant, encore aujourd’hui, le plus célèbre Capitaine Français de la guerre de Cent Ans. Noble Breton, il né en 1320 au château familial de La Motte-Broons à quelques kilomètres de Dinan. Il passera toute sa vie à défendre la Bretagne, puis la France, contre l’envahisseur Anglais. Le 2 octobre 1370, il est nommé par Charles V, Connétable de France, c’est à dire Chef souverain des armées de France.
Il meurt en 1380 de maladie alors qu’il assiège une forteresse du Massif central, Châteauneuf-de-Randon, loin de la Bretagne dont il disait qu’elle était « Ma nation et mon pays ».
La reconnaissance politique que le roi Charles V veut témoigner à son connétable vaut à du Guesclin le privilège d’une quadruple sépulture. Il est probablement le seul défunt au monde à posséder quatre tombeaux.
Ces quatre sépultures se sont pas du fait seul du roi ! Le corps du défunt pourrissant rapidement du fait de la chaleur ou de la maladresse des praticiens, il fut décidé d’enterrer les entrailles rapidement pour éviter toutes épidémies.
Passant outre les dernières volontés de Du Guesclin qui voulait être inhumé en Bretagne, le roi Charles V décide de faire enterrer les ossements de son connétable dans la basilique royale de Saint-Denis, aux pieds de son propre tombeau. Son cœur seul parvient en Bretagne où il est déposé sous une dalle d’une chapelle du couvent des Jacobins à Dinan. La chapelle tombant en ruine au XIXe siècle, le 9 juillet 1810, la pierre tombale et l’urne contenant le cœur sont transférées dans la basilique Saint-Sauveur de Dinan. L’Église Saint-Laurent du Puy-en-Velay, abrite une niche funéraire, ou enfeu, contenant ses entrailles. Enfin, ses chairs sont inhumées au couvent des Cordeliers de Montferrand.
Trois des quatre tombes sont encore visibles et ornées de monuments, celle de Montferrand ayant disparu lors de la Révolution française.
Entre 1384 et 1393, Jean IV renforce la protection de la ville en construisant le donjon, ou tour ducale. Le tracé de l’enceinte de la ville se fixe à cette période.
XVème siècle
Dès 1418, la ville de Dinan a une organisation municipale (« communauté de ville ») et envoie des députés aux États de Bretagne. Au point de vue judiciaire, Dinan est le siège d’une sénéchaussée ducale.
La prospérité dinannaise de la fin du Moyen Âge fait de la cité un centre religieux d’importance.
Dès les XIIIème siècle, Dominicains et Franciscains avaient établi des couvents dans la ville, en 1458 Ils sont rejoints par les Clarisses.
Puis c’est le début d’importants travaux de reconstruction des églises paroissiales:
la première église Saint-Malo est abandonnée pour être reconstruite en 1490 intra-muros tandis que l’église Saint-Sauveur fait l’objet d’un vaste chantier de reconstruction.
Le succès économique de la bourgeoisie dinannaise se concrétise avec la construction de la Tour de l’Horloge au cours des années 1470, véritable symbole du pouvoir municipal qui rivalise dans l’espace avec le donjon du duc et les clochers du clergé.
Dans le même temps, les fortifications de la ville sont modernisées avec l’addition de plusieurs tours d’artillerie. Certaines tours de l’enceinte portent les armoiries de Jean II de Coëtquen, capitaine de Dinan de 1476 à 1481.
le 28 juillet 1488 a lieu la bataille de Saint-Aubin-du-Cormier (35) entre les troupes du Roi de France et les troupes du Duc de Bretagne François II.
Au cours de cette bataille, Jean IV de Rieux, général des armées du Duc de Bretagne François II, Capitaine de la ville de Nantes et tuteur de la jeune Anne, s’enfuit et se réfugie à Dinan.
Les bretons perdent cette bataille, ce qui met un coup d’arrêt à la révolte d’une coalition de grands seigneurs féodaux à l’encontre du royaume de France.
Le 4 août 1488, l’armée Française est aux portes de Dinan, et sans qu’aucun coup de canon ne soit tiré, le gouverneur de Dinan remet les clefs de la ville au représentant du roi de France.
Conformément au traité du Verger qui est signé suite à cette bataille le 19 août 1488, les villes de Dinan, Saint-Malo, Fougères et Saint-Aubin sont remises en garantie au roi de France.
De même, le Duc de Bretagne François II, est contraint d’accepter qu’il ne pourra marier ses filles sans le consentement du roi de France.
Malgré le traité du Verger, dès la fin 1488, la guerre reprend pour encore trois ans, jusqu’à ce qu’en décembre 1491, Charles VIII, Roi de France, épouse Anne de Bretagne, âgée de 14 ans, devenue Duchesse de Bretagne le 10 février 1489, à la mort de son père François II.
À posteriori, la bataille de Saint-Aubin-du-Cormier est considérée par les nationalistes bretons comme le moment où la Bretagne perd son indépendance.
XVIème siècle
Comme toutes les autres villes bretonnes, Dinan est définitivement rattachée au Royaume de France en août 1532.
Dinan continue de prospérer au sein de ses remparts puissants, ce qui fait dire à Anne de Bretagne que Dinan est « la clé de ma cassette ». La Duchesse Anne offrira en 1507 la cloche qui ornera le beffroi de la tour de l’horloge construite quelques années auparavant.
Le couvent des Cordeliers accueille les états généraux de Bretagne en 1573.
En 1582, Philippe-Emmanuel de Lorraine, Duc de Mercoeur, est nommé Gouverneur de Bretagne par Henry III.
Catholique convaincu, il devient chef de la ligue des Catholiques de Bretagne à l’avènement au trône de France du protestant Henri IV de Navarre. Il songe alors à rétablir la souveraineté du duché de Bretagne à son profit, sa femme étant l’héritière des Penthièvre.
Au cours de la 8ème guerre de religion, entre 1585 et 1598, le duc de Mercoeur est un ennemi farouche du roi de France. La Bretagne jusqu’alors en dehors des troubles, rejoint le mouvement en 1589 à l’instigation du gouverneur de Bretagne.
Au cours de cette période, il fait de Dinan une place forte de la Ligue contre les protestants, contre l’avis des Dinannais. Il renforce les défenses de la ville, fortifie le Donjon et en fait sa résidence principale.
En 1585, il fait édifier un passage appelée « souterrain Mercœur » pour relier le donjon et la tour de Coëtquen en passant par la porte du Guichet.
En 1593, Il fait murer la porte du Guichet (sa réouverture ne date que de 1932) et la porte du Jerzual (elle est ré-ouverte en 1642).
la porte Saint-Malo est également renforcée et est nommée Bastion Mercœur. C’est une forteresse pourvue de multiples systèmes de défense qui était garnie d’une herse, d’assommoirs et de portes en bois.
C’est par cette porte que l’armée royale, grâce à la complicité de certains Dinannais, pénètre dans la ville en février 1598 et obtient la reddition du Duc de Mercoeur et de ses hommes.
Henri IV signe alors l’édit de Nantes le 15 avril 1598, édit de pacification autorisant le culte protestant et mettant ainsi fin à plus de 30 ans de guerres de Religion en France.
A partir de cette époque, les fortifications perdent leur usage défensif et ne sont plus entretenues.
XVIIème siècle
L’histoire de Dinan ne se fige pas à la fin du Moyen Age. Deux siècles de paix relative permettent à la ville de se construire un nouveau visage: de place forte, elle devient ville de couvents.
En effet, tout au long du XVIIème siècle, les religieux installent de nombreux couvents. Le couvent des Ursulines est fondé en 1617, les couvents des Dominicaines et des Catherinettes en 1625, le couvent des Bénédictines en 1633.
Ceux-ci s’ajoutent aux couvents des Clarisses, des Jacobins, des Trinitaires et des Cordeliers.
En 1634, pour la seconde fois, Le couvent des Cordeliers accueille les états généraux de Bretagne.
Jusqu’à la fin du XVIIème siècle, la prospérité dinannaise se construit autour de la production et du commerce de la toile, vers l’Europe du nord puis, à partir des guerres de Louis XIV, vers l’Espagne et les colonies d’Amérique.
La ville continue à prospérer, avec une activité artisanale soutenue intra-muros et la présence du port sur la Rance qui favorise le commerce. Dinan contrôle en effet la voie fluviale permettant de transporter les marchandises jusqu’à Saint-Malo comme des toiles utilisées pour les voiles des navires et produites grâce à l’installation de nombreux tisserands.
XVIIIème siècle
Les nombreuses maisons en pan de bois du centre historique témoignent de cette prospérité. Édifiées pour la plupart entre le XVIème et le XVIIIème siècle, qu’elles soient à porches ou à vitrines, ces demeures restent l’apanage des nobles et des bourgeois fortunés jusqu’à ce que le XVIIIème siècle, et ses nombreux hôtels particuliers de pierre ne viennent réduire leur attrait.
À partir de 1769, la ville de Dinan va investir dans sa « Fontaine des Eaux », une source d’eaux minérales connue depuis 1648, qui a des vertus « miraculeuses » selon certains analystes de l’époque. Une station thermale est construite, des milliers de personnes y viennent chaque année, jusqu’au jour où, en 1929 un ouragan détruit tout sur son passage.
Dès 1781, alors que Dinan avait conservé intact sa ceinture de remparts, l’aménagement du Grand-chemin, l’actuelle rue du Général De Gaulle qui remonte du port vers le centre ville en longeant les remparts, déplace une partie de la circulation vers le sud de la ville et entraîne les premiers démantèlements de la muraille. Une tourelle et la Tour du Bois Harouard sont détruites entre 1781 et 1783 pour permettre la construction de cette rue.
Quand éclate la Révolution, un tiers du foncier de l’intra-muros appartient au clergé.
Alors que Dinan traverse la Révolution sans trop de heurts, la plupart des couvents sont fermés et confisqués. Cela permet un redéploiement de la ville à l’intérieur des murs et les premières manufactures de toiles apparaissent. Par exemples, l’ancien couvent des Ursulines devient en 1802, une manufacture de tissage de toiles à voiles.
La France connaît à nouveau des heurts dès 1791 avec la « Chouannerie » qui est une guerre civile qui opposera les Républicains et les Royalistes dans plusieurs régions de l’ouest de la France dont la Bretagne qui veut défendre la monarchie et rétablir les lois et coutumes particulières de la Bretagne supprimées en 1789.
XIXème siècle
Face à la menace, la ville est remise en état de défense en Juin 1815.
Une petite chouannerie éclatera à nouveau en 1815. A cette occasion des troupes sont levées à Dinan.
Durant ce mouvement, 8 officiers de la légion de Dinan réalisent un coup d’éclat en s’emparant du Fort-la-Latte. Ceux-ci escaladant les murailles et surprenant les 40 hommes de la garnison qui se rendent.
Puis ce sont 200 chouans Dinannais et 600 autres soldats, qui s’emparent de Plancoët alors aux mains des Républicains qui se replient à Dinan sans combattre.
A Dinan, le drapeau tricolore a été hissé sur la tour de l’horloge le 25 Mars 1815, mais dans les campagnes se constitue une armée de volontaires royalistes avec à sa tête Toussaint du Breil, vicomte de Pontbriand, Colonel de l’armée Française et chef Chouan d’un corps de volontaires royaux de l’arrondissement de Dinan.
Pontbriand, rassemble environ 1000 hommes et marche sur Dinan le 23 juillet 1815. Malgré quelques tensions et devant les menaces de Pontbriand de rentrer dans la ville de gré ou de force afin que le prince de la Trémoille, représentant du roi, soit reçu, la ville laisse entrer Pontbriand et une partie de ses hommes par la porte Saint-Malo, le combat est évité.
Au XIXème siècle, le calme revenu, le port perd progressivement de son importance, avec la construction en 1852 du viaduc qui désenclave la ville, et la construction de la première gare SNCF de Dinan en 1879 à la suite de la création du service militaire obligatoire en 1870 et à la construction de casernes à Dinan en 1874.
La ville voit se construire de nombreuses demeures cossues et se transforme peu à peu en destination de villégiature, particulièrement prisée par les Britanniques, son patrimoine devenant alors un atout touristique.
Des régiments de militaires, hussards et dragons prennent leurs quartiers dans les casernes Beaumanoir et Duguesclin.
Dans ces mêmes années, la destruction de la porte de Brest, en 1881, entraîne une prise de conscience de la valeur patrimoniale des remparts de Dinan, leur classement au titre des Monuments Historiques est décidé en 1886 afin de les préserver.
XXème siècle
Lors de son passage dans le pays de Dinan en 1907, Thomas Edward Lawrence, dit Lawrence d’Arabie, déclare être tombé amoureux de la Rance qu’il compare aux rives de la Tamise à Londres.
La même année, Dans la nuit du 3 au 4 février, un incendie détruit cinq maisons à colombages place des cordeliers.
Au cours de la première guerre mondiale, Dinan était une ville de garnison, le 10ème régiment d’artillerie et le 13ème régiment de hussards y étaient basés.
La ville continue à croître et les années 1930 se caractérisent par la construction de bâtiments publics à l’architecture néo-bretonne fortement influencée par l’ Ar Seiz Breur, mouvement artistique créé par un groupe d’artistes bretons entre les deux guerres mondiales, comme la Gare, la Poste, la Caisse d’Épargne, le dispensaire, etc…
Durant le seconde guerre mondiale, les Allemands occupèrent la ville sans rencontrer la moindre résistance. Pendant toute la durée de la guerre, il y eut une assez forte garnison à Dinan, en raison du voisinage des côtes.
L’occupation fut certes pénible comme partout ailleurs, mais sans être cependant trop oppressive. L’ennemi s’était installé dans les maisons particulières dont les habitants furent souvent évincés.
Le 2 Août 1944, les Américains de la 6th Armored Division (6ème division blindée) arrivent à Lanvallay, mais sont arrêtés par un barrage et sont sévèrement accrochés par les troupes allemandes qui résistent et détruisent 5 chars US.
Ils décident de contourner le nid de résistance, et de poursuivre leur course vers Brest. Au cours de leur retraite, un barrage d’artillerie et un soutien aérien sont effectués pour couvrir le repli des troupes américaines. Le premier obus tomba sur Dinan vers 10h30 et le dernier vers 17h30. 1500 à 2000 obus tombèrent pendant ces quelques heures.
Le Samedi 5, à 18h50, les Allemands firent sauter une partie du viaduc ainsi que le petit pont sur la Rance, et ils se replièrent dans la nuit.
Ce n’est que le 6 août 1944 qu’un groupe de reconnaissance du 802nd Tank Destroyer Battalion (802e Bataillon antichar) apprend que Dinan et Lanvallay ont été évacués par les troupes allemandes. les forces américaines entrèrent à 15 heures dans Dinan, après que le génie eut rapidement établi une passerelle provisoire sur la brèche du viaduc. Ils mènent plusieurs reconnaissances dans la ville et la libèrent.
La libération de la ville aura coûté à la population 23 morts et 40 blessés, 4 maisons seulement seront totalement détruites et 250 endommagées. La délivrance était beaucoup moins coûteuse pour Dinan que pour tant d’autres villes bretonnes ou normandes complètement anéanties et où les morts se comptaient par centaines.
Une fois de plus, Dinan s’en tirait relativement bien, conformément au passé.
Les casernes de Dinan, longtemps occupées par les régiments de hussards et de dragons vont peu à peu se vider de leurs militaires et en 1979, le 11e Régiment d’artillerie de marine (RAMA), quitte la caserne Duguesclin qu’elle occupait depuis 1948. D’autres régiments se succèdent dans ces bâtiments de Dinan et d’ Aucaleuc, mais en 1998 les derniers militaires ces camps.
Les casernes Beaumanoir et Duguesclin, désaffectées, ont été rachetées par la commune. Elle conserve 60% des bâtiments pour aménager le nouveau quartier Europe, mêlant constructions militaires réhabilitées, bâtis contemporain et espaces verts. L’ensemble de cet aménagement couvre près de 15ha.
En 1986, le Maire de Dinan, René Benoit, signe une convention avec l’État, faisant de Dinan, la seconde « Ville d’art et d’histoire » de Bretagne. Ce label national créé en 1985, est décerné par le Ministère de la Culture et de la Communication aux territoires qui mettent en œuvre une politique active de valorisation et de sensibilisation autour de leurs patrimoines.
Aujourd’hui, les « Villes et Pays d’art et d’histoire » sont au nombre de 146, dont treize en région Bretagne.
XXIème siècle
Depuis septembre 2017, Dinan et Léhon ont fusionné pour constituer la commune nouvelle de Dinan-Léhon. Par arrêté du préfet des Côtes-d’Armor, la commune nouvelle de Dinan est créée en lieu et place des communes de Dinan et de Léhon à compter du 1er janvier 2018.
Dans la nuit du samedi 22 au dimanche 23 juin 2019, un violent incendie détruit une des plus vieilles maisons de Dinan, cette maison abritait le restaurant de la mère Pourcel et datait de 1457.
quatre camions à échelles et 84 sapeurs-pompiers au total ont mis en place des rideaux d’eau pour éviter la propagation du feu aux autres bâtiments.
Alors qu’ils sont debout depuis près de 10 siècles, depuis quelques années de nombreuses portions de remparts se sont effondrées, en juin 2007 et en mars 2015 sur la rue du Général-de-Gaulle, en décembre 2020 au niveau de la porte du Jerzual et en janvier 2021 sur les petits fossés.
À chaque fois, des infiltrations d’eau sont les principales causes de ces catastrophes. Le patrimoine est fragile et mérite une grande vigilance. Du coup, des grands moyens ont été mis en œuvre afin de les entretenir.
Depuis novembre 2022, une grande campagne de restauration est lancée pour deux ans, pour un montant minimum de 4,5 millions d’Euros. Environ 500 mètres de courtines et 3 tours vont subir une cure de jeunesse. Le gros du travail est d’enlever la végétation qui a poussé dans les joints, de remonter les mur et de refaire les joints.
C’est un gros chantier onéreux, mais il est crucial pour que les générations futures puissent, comme nous et nos prédécesseurs, contempler ces constructions millénaires qui ont traversées les âges en étant épargnés par les guerres et les bombardements. Les Dinannais ont la volonté de faire vivre et revivre le passé prestigieux de leur ville.
Des maisons à colombages bordent encore la place des Cordeliers, la rue de l’Horloge, la célèbre rue du Jerzual et d’autres voies pavées du centre. Les églises Saint-Sauveur et Saint-Malo s’élèvent toujours au milieu des anciennes paroisses de la ville.
Aujourd’hui, grâce à la richesse de son patrimoine, Dinan s’impose comme une cité incontournable de la Bretagne culturelle et touristique. La sauvegarde de ce trésor architecturale passe par sa préservation et la promotion à travers des actions comme la fête des remparts qui à lieu tous les deux ans.
Nous ne pouvons souhaiter à notre belle ville que de continuer prospérer comme elle le fait depuis de nombreux siècles, et de ne pas oublier son histoire qui a fait d’elle ce qu’elle est aujourd’hui.